JOURNAL DE MA CHAMBRE - Lettre à un ami

JOURNAL DE MA CHAMBRE

Mon ami,
Je t’ai acheté un jour de janvier (avec mes étrennes 2014) et quand je t’ai vu, je me suis dit : ô splendeur! Mais oui, c’est lui, le voilà ! (il faut dire aussi que tu étais le moins cher et ça ça m’a tapé dans l’oeil). Je t’ai ramené à la maison, tu étais en pièces détachés, mon pauvre petit coco, mais j’ai pris mes plus beaux tournevis et je t’ai assemblé (ça m’a pris une semaine et depuis je vis seule et les tournevis ont disparus, mais je ne t’en veux pas va …). Et puis toi et moi, ça a été fusionnel, dès que je pouvais, hop, je te grimpais dessus. Je me souviens, tu avais un petit cadran (comme un petit visage contrefait) où tu m’indiquais les kilomètres parcourus et les calories brulées (et tu es un sacré blagueur parce ce que je suis sûre d’avoir parcourue bien plus de kilomètres que ce que tu veux bien dire, quant aux calories, évitons le sujet, j’ai appelé dix fois le service après-vente parce que là non plus ça ne correspondait pas selon moi). Au bout de quelques jours, je ne sais pas, j’ai senti que j’avais besoin de prendre de la distance, que j’étouffais dans notre relation, que tu ne me laissais pas être celle que je suis, que tu voulais tout contrôler (avec ton petit visage contrefait), et je me suis avisée que je n’avais pas de porte-manteaux, et puis tu as disparu (j’ai beaucoup de manteaux, pourquoi est-ce que je mets toujours le même?).
Mais voilà, je ne sais pas si tu es au courant mais en ce moment nos vies sont un peu compliqués et je fais beaucoup de gâteaux (et je les mange tous, les tournevis n’étant jamais revenus et n’en ayant pas encore trouvé des nouveaux…) et j’ai des fourmis dans les jambes. Alors, j’ai jeté mes manteaux (sur le rameur) et tu es revenu. Ô joie ! Et depuis, toi et moi, c’est reparti comme en quarante (kilomètres)! Pas l’ombre d’un reproche sur ton petit visage (contrefait)  - as-tu une âme? - et moi ça m’est égal que tu mentes comme un arracheur de dents au sujet des kilomètres et des calories, on a tous nos petits défauts.
Alors mon ami, mon frère, ma vie, ma joie, je te demande pardon et je te suis reconnaissante d’être resté malgré les manteaux, toi mon gentil vélo d’appartement…


Valérie

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